Introduction aux droits de l’homme - Module 8

Module 8 

Les mécanismes de mise en œuvre des droits de l’homme (deuxième partie)

La procédure de l’enquête, c'est un autre principal mécanisme qui a été développé dans le domaine des droits de l’homme. Il s’agit de la lutte contre la torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

La Convention de 1987 a créé le Comité européen pour la prévention de la torture, un organe international indépendant qui travaille parallèlement à la Cour européenne des droits de l’homme. Le Comité est chargé d’enquêter l’interdiction de la torture et des peines, des traitements cruels, inhumains ou dégradants, donc, d’enquêter au sein des États parties.

Le Comité dispose de la faculté d’organiser spontanément des visites sur le territoire des États parties aux fins d’y mener des investigations. Par l’article 2 de la Convention, chaque État Partie autorise la visite de tout lieu relevant de sa juridiction, tout lieu où des personnes sont privées de liberté par une autorité publique. L’originalité de ce mécanisme c’est de tenter de nouer un dialogue sur le terrain et de tenter de proposer des solutions sur le terrain.

L’idée de visite périodique a été intégrée au niveau universel dans le cadre de la Convention des Nations Unies contre la torture et les peines du 10 décembre 1984. Un protocole, adopté le 18 décembre 2002, a transposé à l’échelon mondial, l’établissement d’un système de visites régulières, sur les lieux où se trouvent des personnes qui sont privées de liberté. Le protocole de 2002 a créé un sous-comité pour la prévention de la torture. Chaque État partie est tenue d’autoriser les membres du sous-comité à accomplir des visites sur son sol, dans les lieux où se trouvent, ou pourraient se trouver des personnes privées de liberté. Plus encore, le protocole de 2002, prévoit que chaque État partie mette en place à son niveau propre, un mécanisme national de prévention chargé de prévenir la torture.

Le contrôle du suivi du respect des droits de l’homme


Les constats, les rapports et les recommandations des organes internationaux impliquent que les autorités nationales adoptent, à leur tour, toutes les mesures nécessaires et utiles en vue d’assurer un respect effectif des engagements auxquels elles ont souscrit. Lorsque la Cour européenne des droits de l’homme constate, à la faveur d’une requête individuelle, qu’un État n’a pas respecté la Convention européenne des droits de l’homme, ce seul constat ne suffit pas nécessairement à donner raison au requérant.

Le suivi du respect des droits de l’homme, au niveau national, postérieurement au contrôle pratiqué sur la scène internationale, constitue de nos jours l’un des aspects les plus complexes, mais aussi les plus porteurs, en matière d’évolution des droits de l’homme.

Au niveau européen, par exemple, les arrêts rendus par la Cour européenne des droits de l’homme présentent un caractère obligatoire pour les États, conformément à l’article 46 de la Convention de 1950. Les États assument, selon la jurisprudence de la cour, une obligation de résultat de respect des droits de l’homme, les moyens mis en application à cet effet ressortissants encore à leur souveraineté. C’est le rétablissement du statu quo ante, le rétablissement d’une situation antérieure au constat de violation des droits de la personne humaine.

La Cour européenne des droits de l’homme ne dispose pas du pouvoir d’annuler une mesure administrative nationale ou pénale nationale, comme, par exemple, l’expulsion d’un étranger. Le dépôt d’une plainte individuelle devant la Cour, à Strasbourg, n’est en effet que l’exercice d’une action en constatation de droit qui ne déploie aucun effet cassatoire ou réformatoire. Le dispositif issu d’un arrêt de la cour européenne des droits de l’homme doit donc nécessairement, dans un tel cas, être complété par un autre dispositif de rang national.

C’est pour ça qu’une procédure de révision a été introduite dans la loi suisse, à la fin du 20e siècle. C’était suite à toute une série de condamnations prononcées par la cour européenne des droits de l’homme. C’étaient des condamnations à propos desquelles, d’ailleurs, la question s’est posée de savoir précisément quel suivi pouvait ou devait leur être réservé au niveau national.

Les perspectives d’évolution


Aujourd’hui, les droits de l’homme sont quasiment partout. Ils imprègnent sur le plan universel, comme sur le plan régional, jusqu’aux organisations internationales elles-mêmes,

Au niveau des Nations Unies, par exemple, le nombre de treaty bodies voit, de nos jours, plusieurs comités travailler en parallèle dans le domaine de la protection des droits de la personne humaine.

On peut se demander si cette pluralité des organes et des mécanismes de contrôle est vraiment nécessaire. Elle risque de générer, à terme, des contradictions ou des incompatibilités dans le traitement des questions qui sont posées à ces organes. La coordination et de la multiplication des mécanismes internationaux de contrôle peuvent poser un problème.

Au sein de l’organisation des Nations Unies, on tente de rationaliser, de regrouper ou même de centraliser le travail des organes internationaux chargés de contrôler la mise en œuvre des instruments de protection des droits de l’homme. La création d’une cour universelle des droits de l’homme semble une perspective séduisante.

Si dans cette perspective, des mécanismes, tels que la procédure de révision, commencent à se développer, en Europe en particulier, eh bien, il faut observer que ces procédures restent, pour l’heure, cantonnées aux seuls arrêts que rend la Cour européenne des droits de l’homme. Bien souvent, les arrêts sont considérés comme dépourvus de force contraignante, pour ne recevoir, au mieux, au niveau national qu’un accueil timoré ou peu considéré, alors même qu’il porte sur des garanties aussi centrales et importantes que la lutte contre la torture, contre la discrimination, ou encore en faveur de la protection des personnes les plus vulnérables.

Rien ne justifie que dans un cas la décision européenne lie juridiquement l’État et que tel ne soit pas le cas, au contraire, lorsqu’un constat identique émane d’un organe de protection des droits de l’homme, comme le Comité des Nations Unies contre la torture. Et il nous paraît pour le moins confus ou contradictoire de dire que, in fine, à l’issue du contrôle international chargé de veiller à leur respect, certaines décisions sont obligatoires pour les États et d’autres, en quelque sorte, ne le seraient pas.

Aucun commentaire: